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Les Cheats Codes dans le Retrogaming : Tricher, c’est Jouer !

Les codes de triche peuvent paraître désuets, voire mal perçus aujourd’hui. Pourtant, ils faisaient partie intégrante de la période 80-2000. L’enfant que nous étions alors se ruait en librairie pour dénicher dans son magazine préféré un truc, une astuce pour son jeu du moment. Mais au fait : pourquoi les codes de triche existaient-ils en premier lieu ? Comment se sont-ils développés ? Plongeons ensemble dans cet univers fascinant où les tricheurs étaient parfois encouragés par les développeurs eux-mêmes, et où les astuces faisaient les gros titres de nos magazines préférés.


Pourquoi les Codes de Triche ?

Les Raison Derrière l’Intégration des Codes de Triche

Tout d’abord, les développeurs ont intégré des codes de triche pour une raison que l’on peut qualifier d’essentiel dans le processus de création . Il s’agissait en effet de faciliter la phase de test d’un jeu. Avant la sortie de celui-ci, les développeurs et les testeurs – quand un jeu avait l’opportunité d’être conçu par plus d’une personne , ce qui n’était clairement pas toujours le cas, surtout durant les années 80 – devaient contrôler chaque aspect du gameplay afin de s’assurer de sa qualité, souvent en répétant les mêmes sections encore et encore, et encore… Pour s’assurer qu’il n’y avait pas de bugs majeurs, voire bloquants. Ainsi, Les codes de ‘triche’ établis leur permettaient par exemple de sauter des niveaux, de devenir invincibles ou d’obtenir des ressources infinies. Cela rendait donc, vous l’aurez compris, le process de test beaucoup moins fastidieux. Et tous les développeurs que c’est une phase peu agréable, n’est-ce pas ?

En outre, les développeurs incluaient souvent des codes pour améliorer l’expérience des joueurs. Les jeux des années 80 et 90 étaient souvent conçus pour être très difficiles, en partie pour prolonger leur durée de vie étant donné les limitations techniques de l’époque. Les codes de triche offraient une manière de rendre les jeux plus accessibles et moins frustrants pour les joueurs. Par exemple, des codes comme le célèbre Konami Code permettaient d’obtenir des vies supplémentaires ou des pouvoirs spéciaux, donnant aux joueurs une chance de progresser dans des jeux particulièrement ardus.

De plus, certains codes étaient destinés à être des easter eggs, de petites récompenses pour les joueurs les plus curieux. Découvrir ces codes par hasard ou grâce à des magazines spécialisés ajoutait une dimension supplémentaire de plaisir et de mystère aux jeux. Cela créait une connexion spéciale entre les développeurs et les joueurs, rendant l’exploration et la découverte encore plus gratifiantes. Ainsi, les codes de triche ont joué un rôle crucial dans l’histoire du jeu vidéo, offrant à la fois des outils pratiques pour les développeurs et des trésors cachés pour les joueurs.

Manic Miner

Le Premier Jeu avec un Code de Triche

L’un des premiers jeux connus pour avoir intégré un code de triche est Manic Miner, sorti en 1983. Ce jeu de plateforme, développé par Matthew Smith, cachait une astuce bien particulière : en tapant “6031769” (c’était le numéro de permis de conduire de Smith), les joueurs activaient le mode triche. Ce code offrait la possibilité de traverser les niveaux en se téléportant avec plus de facilité : une aide, une vraie de vraie donc, dans un jeu réputé pour sa difficulté assez impitoyable pour ceux qui ont connu. En fait, cette petite astuce nous a non seulement offert à l’époque une nouvelle manière d’aborder le jeu, mais elle a également ouvert la voie, par la suite, à d’autres développeurs pour intégrer un principe similaire de codes de triche dans leurs créations.

Ces codes, comme vous vous en doutez, ne serait-ce que par expérience, sont souvent cachés et destinés avant tout à des fins de tests comme nous l’évoquions polus haut. Mais ces derniers ont progressivement été découverts par les joueurs – ils ont la fâcheuse tendance d’être curieux, selon la rumeur – ce qui a permis à tous les gamers que nous sommes d’ajouter une une dimension supplémentaire de mystère et de découverte dans nos jeux vidéo préférés. Manic Miner a ainsi marqué le début d’une ère où les codes de triche sont devenus un élément emblématique du retrogaming, transformant la manière dont on pouvait aborder un jeu…

Le Pouvoir des Combinaisons de Touches : Quand les Développeurs Jouent avec Nous

Le Légendaire Konami Code

Le Konami Code dans Wreck-It Ralph

Parlons du plus célèbre de tous, le Konami Code. Ce code mythique est apparu pour la première fois dans Gradius en 1986. Pour ceux qui ne le connaissent pas, il suffit d’entrer cette succession de touches : haut, haut, bas, bas, gauche, droite, gauche, droite, B, A. Ce petit bijou, conçu par le développeur Kazuhisa Hashimoto lors des phases de test du jeu, offrait aux joueurs des avantages cruciaux comme des vies supplémentaires et des power-ups, une vraie bouée de sauvetage dans des jeux souvent impitoyables.

On peut le dire, le Konami Code est rapidement devenu un emblème de la triche dans les jeux vidéo, réapparaissant dans de nombreux autres titres de Konami tels que Contra, où il donnait 30 vies, rendant le jeu beaucoup – beaucoup – plus accessible. Ce code est devenu en quelques sortes un phénomène du jeu vidéo à lui seul : s’il reste, certes, une méthode de triche avant tout, on peut le voir aussi comme un clin d’œil complice entre les développeurs et les joueurs, qui est d’ailleurs attendu au tournant à chaque jeu Konami. Le Konami Code a aussi franchi les frontières des jeux vidéo pour devenir une réf ‘ de la pop culture, apparaissant à la télé, au cinéma ou même sur des sites web comme un easter egg amusant pour “ceux qui savent”.

Les Sélections de Niveau et autres Joyeusetés

De nombreux jeux intégraient des sélections de niveaux via des codes secrets, permettant aux joueurs de sauter directement à leur niveau préféré (ou pas), ou de reprendre là où ils avaient arrêté à une époque où les sauvegardes se faisaient encore rares. Dans Sonic the Hedgehog par exemple, entrer une combinaison spécifique à l’écran titre permettait d’accéder à n’importe quel niveau. Ce qui peut être apprécié quand on a du mal à passer Marble Zone et qu’on est du genre impatient… Ainsi, de nombreuses manettes ont probablement pu être préservées car leurs possesseurs n’ont pas eu besoin de les jeter de rage !

Le Stage Select du premier Sonic sur Mega Drive

Un exemple célèbre d’utilisation de cheat code se trouve dans le jeu-phénomène The Sims, où le code Rosebud nous permettait d’obtenir rapidement du cash à n’en plus finir pour construire des manoirs extravagants et acquérir tout ce que nous souhaitions, comme si on avait gagné à l’Euromillion. Autre code bien connu des joueurs : dans GoldenEye 007 sur Nintendo 64, le DK Mode est devenu emblématique. Si la combinaison de touches à entrer est assez compliquée, une fois réussie, les agents secrets en herbe pouvaient activer ce mode qui… Agrandissait la tête et les bras des personnages, les faisant ressembler à Donkey Kong. Oui, vous avez bien lu. Non seulement cela rendait le jeu hilarant, mais cela offrait également une cible plus grande pour les tirs à la tête. Pas sûr qu’on puisse parler de triche pour autant, mais ce code secret était bien un moyen de prolonger le fun dans un jeu qui n’en manquait déjà pas !

Les Systèmes de Triche Externes : Quand les Joueurs Prennent le Contrôle

Game Genie : La Boîte de Pandore des Tricheurs

Une publicité pour le Game Genie

Avez-vous connu, ou eu chez vous, le Game Genie ? Cet accessoire bien mystérieux, apparu tout d’abord pour la NES en 1990, permettait de modifier les jeux en se branchant entre la console et la cartouche puis en entrant des codes spécifiques dans une interface dédiée. Vies infinies, invincibilité, sauts lunaires… tout devenait possible. Avec cet outil, les joueurs pouvaient explorer leurs jeux préférés d’une manière totalement nouvelle, transformant des défis insurmontables en balades de santé. Cependant, cette liberté de manipulation n’était pas du goût de tout le monde. Le hic, c’est que ces codes n’étaient pas prévus initialement pas le jeu dans sa conception. L’accessoire venait insérer son propre code pour altérer le comportement de la cartouche sur laquelle il était branché.

Nintendo n’était pas content, mais alors pas content du tout en découvrant ce concept. Ainsi, le géant japonais du jeu vidéo a rapidement intenté un procès contre Galoob, le fabricant du Game Genie (et aussi des Micro Machines accessoirement), en affirmant que cet appareil créait des œuvres dérivées non autorisées et modifiait l’expérience de jeu de telel façon qu’elle pouvant nuire à la réputation de leurs jeux. Pour la firme de Kyoto, le Game Genie menaçait ni plus ni moins l’intégrité de ses créations et risquait de frustrer les joueurs avec des bugs et des expériences dénaturées. En somme, la société craignait que les joueurs ne s’éloigne de leurs jeux en découvrant ces derniers comme étant buggés et mal conçus…

En 1992, un juge a toutefois statué en faveur de Galoob, permettant ainsi au Game Genie de continuer à se vendre et de prospérer sur d’autres consoles. Cette décision a au passage ouvert un débat sur la nature du jeu vidéo et la place de la triche, soulevant des questions sur la balance entre le plaisir du joueur et la vision des développeurs. Le Game Genie est ainsi devenu un symbole de la dualité entre contrôle créatif et liberté des joueurs.

Action Replay : L’Alternative Révolutionnaire

L’Action Replay, quant à lui, est apparu à la fin des années 80 et offrait une alternative au Game Genie en proposant des possibilités de triche encore plus étendues. Initialement disponible sur micro-ordinateurs comme le Commodore 64 et l’Amiga, cet appareil permettait d’injecter des codes directement dans la mémoire du jeu, ouvrant ainsi la porte à une personnalisation sans limites. Même si aucun code n’était défini par défaut, il suffisait de reproduire un comportement attendu dans le jeu (comme obtenir une vie), allumer le dispositif pour afficher une série de codes hexadécimaux et tester celui qui offrirait le comportement attendu. Il ne suffisait, en général que de quelques tentatives pour trouver le bon code et ainsi se sentir – littéralement – invincible dans le jeu.

L’Action Replay était également proposé sur les consoles de troisième génération, coexistant avec le Game Genie. Cet outil permettait aux joueurs de modifier les jeux à leur guise, ajoutant des vies infinies, débloquant des niveaux cachés, ou modifiant les statistiques des personnages. Qui n’a jamais rêvé de transformer tous les personnages de Street Fighter II en E. Honda ? Comment ça, personne ? C’est en tout cas le potentiel quasi-infini de cet accessoire.

Bien que Sega n’ait pas engagé de poursuites aussi médiatisées que Nintendo, les préoccupations parmi les développeurs demeuraient. Le consensus était que ces dispositifs pouvaient nuire à l’expérience de jeu, rendant certains aspects trop faciles ou complètement déséquilibrés. Malgré ces critiques, l’Action Replay est devenu un outil populaire parmi les joueurs cherchant à explorer les limites de leurs jeux favoris, perpétuant ainsi la tradition de la triche dans le retrogaming.

La Culture des Trucs et Astuces

L’Âge d’Or des Magazines de Triche

Dans cette ère pré-Internet, où trouver des astuces relevait souvent de la quête épique, les magazines de jeux vidéo jouaient un rôle crucial. Des publications françaises comme Player One, Mega Force, Console + et Joypad sortaient régulièrement des hors-séries dédiés aux trucs et astuces. Ces guides étaient des bibles pour les joueurs cherchant à percer les secrets de leurs jeux préférés. On y trouvait des codes de triche bien sûr, des solutions plus ou moins complètes….

C’était aussi l’époque où l’on échangeait fièrement ses trouvailles dans la cour de récré, peut-être même en faisant croire que nous l’avions trouvé tout seul comme un grand ! Les kiosques à journaux étaient des trésors pour les jeunes gamers, qui attendaient alors chaque nouvelle parution avec impatience, dans l’espoir de trouver leur jeu du moment cité dans la revue. Les astuces trouvées dans ces pages pouvaient transformer une expérience de jeu frustrante en une aventure victorieuse, renforçant le lien entre les joueurs et leurs magazines favoris.

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Un Equilibre Pas si Simple

Au fil des ans, les codes de triche intégrés volontairement par les développeurs sont souvent devenus un clin d’œil complice aux joueurs. Ces codes faisaient partie de l’expérience de jeu, ajoutant une couche de mystère et de satisfaction pour ceux qui les découvraient. En intégrant ces codes, les développeurs offraient aux joueurs un moyen sympa d’explorer le jeu sous un autre angle, rendant l’expérience plus riche et variée. Plutôt malin quand on y pense.

Cependant, les accessoires comme le Game Genie et l’Action Replay, bien qu’appréciés par les joueurs, pouvaient parfois irriter les créateurs de jeux comme nous l’avons déjà évoqué. Ces appareils permettaient de modifier les jeux de manière non prévue, ce qui pouvait entraîner des bugs ou des expériences de jeu dénaturées. Certains développeurs voyaient leurs œuvres transformées, parfois au détriment de l’équilibre et de l’intégrité du jeu, en atteste la position de Nintendo sur la situation vis-à-vis de Galoob.

En fin de compte, si l’on se met à leur place, il est évident que les développeurs pouvaient parfois se trouver dans une position délicate, le fessier entre deux chaises : désireux d’offrir une expérience – contrôlée – la plus agréable qui soit, tout en étant conscients que la créativité des joueurs pouvait mener à des cas imprévus et pouvant être parfois carrément indésirables. Et non, ça ne fait pas forcément plaisir de votre son œuvre détournée. Mais c’est cette dualité a façonné l’évolution des codes de triche et leur place dans le monde du jeu vidéo.

La Triche : Un Moyen d’Accessibilité ou une Simple Facilitation ?

Difficile de ne pas tricher dans Dragon’s Lair…

La triche dans les jeux vidéo soulève des débats sur l’accessibilité. Dans des jeux souvent extrêmement difficiles, les codes de triche permettaient à un plus grand nombre de joueurs de profiter pleinement de l’expérience. Ils offraient une porte de sortie face à la frustration et ouvraient la voie à une exploration plus libre des mondes virtuels, permettant à ceux qui n’avaient pas le temps ou les compétences nécessaires de voir la fin d’un jeu.

Cependant, certains puristes, hardcore gamers, appelez-les comme vous voulez, considèrent que tricher revient à dénaturer l’essence même du jeu. Pour eux, le véritable plaisir réside dans le défi et la satisfaction de surmonter des obstacles par ses propres moyens. Tricher retire ainsi le challenge et le sentiment de victoire authentique. Ça peut se comprendre, bien qu’il faille respecter aussi les joueurs qui voudraient profiter de ce que le jeu peut proposer jusqu’à sa fin, d’une façon ou d’une autre. La triche peut donc être vue à la fois comme un outil d’accessibilité précieuse pour ceux qui sont en difficulté mais aussi comme une simplification qui enlève une part de l’expérience de jeu originale.


Les codes de triche, au même titre que les accessoires que nous avons évoqué dans ce dossier, ont assurément marqué l’histoire du retrogaming. Ils représentent une facette passionnante de cette époque où chaque jeu pouvait cacher plein de petits secrets, où chaque combinaison de touches tentée fébrilement par le joueur manette en main pouvait ouvrir de nouvelles perspectives. Bien que controversés, ces cheat codes ont permis à désormais plusieurs générations de joueurs de découvrir des jeux sous un angle différent, mêlant frustration, surprise et jubilation.

Alors, la prochaine fois que vous entrez ce bon vieux Konami Code, souvenez-vous que vous faites partie désormais d’une tradition presque aussi vieille que le jeu vidéo lui-même. Et qui sait ? Peut-être qu’un secret encore jamais découvert se cache encore dans vos titres préférés, attendant patiemment d’être trouvé…

N’oubliez pas, chers lecteurs, dans le monde du retrogaming, la triche n’est pas toujours une mauvaise chose. Parfois, c’est juste une autre manière de jouer, de découvrir et d’apprécier ces classiques intemporels. Bonne triche à tous !

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